Le thé par Pascale Imbert

LE THE

 

Qu’il soit vert, noir ou rouge, du matin ou du « Five o’clock », le thé a toujours su nous faire voyager. Son goût amer évoque, en nous, des traditions ancestrales comme la « Cérémonie du thé » ou la fameuse « Route du thé ». Nos sens s’éveillent, s’émerveillent, touchant notre imaginaire le plus profond… Oolong, Pu’er, Yunnan résonnent comme des mots magiques et nous transportent, loin, dans une Chine traditionnelle qui existe encore…

 

Le thé vert, Camellia sinensis L. Kuntze, comme son nom latin l’indique, est originaire de Chine, et appartient à la famille des Theaceae. Le thé noir est un thé vert qui a subi une oxydation totale (fermentation), il est appelé « thé rouge » en Chine. Tandis qu’en Occident, le thé rouge est l’Aspalathus linearis (Burman F.), appelé Rooibos. Il pousse en Afrique du sud et appartient à la famille des Fabaceae… ce n’est donc pas un « thé » au sens botanique du terme !

D’après la légende chinoise, l’utilisation des feuilles de théier sous forme de boisson fut découverte par l’Empereur Shen Nong (2700 ans av JC) connu, notamment, pour ses connaissances en botanique. Un petit vent léger aurait fait tomber, par hasard, quelques feuilles dans sa bouilloire ; l’Empereur aurait trouvé cette infusion très rafraichissante et stimulante et l’aurait adoptée. Pourtant ce n’est que plus tard, sous la Dynastie des Jin, que l’on trouve les premiers écrits concernant le thé. Tandis que les européens découvrirent ce breuvage quelques siècles plus tard (XVIIème siècle).

Depuis cette époque, le thé a fait l’objet de nombreuses études scientifiques. On sait qu’il contient des :

  • protéines (15 %)
  • acides aminés : théanine, sérine…
  • glucides solubles 
  • bases puriques : caféine, théophylline, théobromine
  • polyphénols : acides phénols, tanins galliques, flavonoïdes, proanthocyanidols…
  • vitamines : A, B1, B2, C, E, P…
  • minéraux : potassium, phosphore, magnésium, fluor

Cette richesse en composés naturels lui confère des propriétés thérapeutiques intéressantes. Le thé est un :

  • stimulant du système nerveux central
  • antioxydant
  • diurétique
  • antimicrobien
  • angio-protecteur
  • anti-inflammatoire
  • lipolytique

Des études, in vitro, lui attribuent des activités contre l’ostéoporose et le cancer. Elles seraient dues à la présence de gallate d’épigallocatéchol (proanthocyanidol).

Cependant il est important de mentionner qu’après fermentation du thé vert (thé noir) la composition chimique de la feuille de théier varie un peu.

Le thé est la boisson la plus consommée au monde après l’eau. Malgré l’absence d’études cliniques randomisées, ses propriétés stimulante et diurétique sont connues depuis la nuit des temps. Il faut savoir qu’une tasse de thé est 2 à 4 fois moins concentrée en caféine qu’une même tasse de café ; de plus la présence de polyphénols module l’activité de cette « molécule excitante ». Si l’on veut obtenir un thé plus « doux », il faut le laisser infuser longtemps… ce qui pourrait sembler paradoxal ! Avec le temps l’extraction en polyphénols est alors plus importante !

 

Le Rooibos est aussi riche en polyphénols. On y trouve de l’aspalathine (seule source naturelle connue), de la nothofagine… Il ne contient pas de caféine. Aucune étude clinique n’a été menée pour confirmer les usages ancestraux du « thé rouge ». Cependant, plusieurs médecins sud-africains en recommandent l’infusion pour soulager les coliques des bébés, les troubles digestifs ou les troubles du sommeil et, par voie externe, pour traiter les allergies cutanées, l’eczéma et les érythèmes fessiers.

De nos jours, on attribue au Rooibos une activité contre l’obésité. Une étude récente (1) a mis en évidence son activité au niveau des adipocytes, cellules spécialisées dans le stockage des graisses. Il en ressort que la plante inhibe l’accumulation intracellulaire des lipides et ralentit la création de nouveaux adipocytes. Les chercheurs ont également constaté que l’exposition des adipocytes au Rooibos entrainait une moindre sécrétion de leptine, «hormone de la faim», qui contrôle le sentiment de satiété et influe sur la dépense énergétique de l’organisme. Une concentration plus forte en Rooibos entrainerait, d’ailleurs, une augmentation de la concentration cellulaire d’ATP qui fournit de l’énergie aux cellules.

Qu’ils soient contenus dans le thé, le chocolat (comme le souligne Virginie Parée dans son article du mois d’avril) ou le raisin… les polyphénols ont des activités thérapeutiques bénéfiques sur l’organisme. 

 

Le thé est connu en Chine, comme médecine, depuis le milieu du premier millénaire avant notre ère. Il pouvait être consommé avec du sel et d’autres plantes amères. Cette boisson frugale conquiert, très vite, les monastères bouddhistes où elle est appréciée pour l’état de veille qu’elle favorise. Au XIIème siècle les premiers théiers sont acclimatés au Japon. Les japonais n’auront de cesse de transformer et de perfectionner un « Art de Vivre » concernant cette plante « magique ».

Le thé est un breuvage ancestral dont l’amertume due aux tanins éveille nos papilles. En Occident, accompagné de lait ou de citron, il est consommé avec plaisir tout au long de la journée. La cueillette manuelle de ses jeunes feuilles, par des femmes, en fait une boisson délicate. On y retrouve la force de cette plante d’altitude, sa vigueur, ainsi que celle de la nature pour le bien-être et le ravissement de tous ses fervents adeptes.

 

  1. Sanderson M, Mazibuko SE, Joubert E, de Beer D, Johnson R, Pheiffer C, Louw J, Muller CJ. Effects of fermented rooibos (Aspalathus linearis) on adipocyte differentiation. Phytomedicine 2014 Jan 15 ; 21 (2) : 109-17.             

 

Pascale Imbert, Docteur en Pharmacie                           www.biodansnosvies.fr